La poésie castillane de la fin du Moyen Âge au début du Siècle d'or

La poésie castillane de la fin du Moyen Âge au début du Siècle d'or

En 1440, Juan de Mena offre le Laberinto de Fortuna au roi de Castille Juan II ; Garcilaso meurt en 1536, près de Nice, lors de l’une des campagnes militaires de Charles Quint contre la France. Un siècle à peine sépare le poème politique de Mena de l’œuvre lyrique du Prince des Poètes mais tout semble les séparer, sauf la gloire littéraire de leurs auteurs que réunit encore l’écriture amoureuse : Juan de Mena est en effet un grand poète cancioneril et la première poésie de Garcilaso porte l’empreinte de l’esthétique raffinée, sophistiquée, des variations poétiques sur les mots et les paradoxes de l’amour. Le Laberinto de Fortuna, aux frontières incertaines du Moyen Âge et de la Renaissance, fascine par son artifice et sa vérité. Nebrija en fait la référence majeure des chapitres de métrique de sa Gramática española et les humanistes l’éditent et le commentent, soit pour exalter la teneur morale ou nationale de ses copias et la dignité de la langue, latinisante et sublime soit, comme Juan de Valdés, pour en dénoncer l’obscurité et le caractère hybride et « monstrueux ». Le poème, érudit, complexe, est emporté par un souffle épique et une vigueur dramatique remarquables ; il est aussi traversé par des moments d’émotion, de courage moral, intellectuel et politique et par des épisodes d’une extraordinaire puissance poétique. À l’inverse de Juan de Mena, qui s’inscrit dans la lignée conceptiste des Lucain, des Góngora ou des Gracián, Garcilaso de la Vega dote la poésie espagnole d’une langue lumineuse et fluide dont l’exceptionnelle harmonie produit un étonnant « effet de naturel ». Ainsi passent inaperçus le travail rhétorique et l’érudition, si profondément assimilée qu’elle en devient culture. Très largement autobiographique, la poésie lyrique de Garcilaso, en assimilant les traditions péninsulaires et les conquêtes définitives de Pétrarque, en adoptant l’ample et souple hendécasyllabe, en ouvrant la « prison d’amour » aux beautés d’une Nature amène, invente la grammaire lyrique de l’émotion et réalise une véritable révolution dont les résonances s’entendent encore dans la poésie du vingtième siècle espagnol.

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